La loupe pour malvoyant est l’accessoire naturel des personnes dont la vue se dégrade fortement. Mais derrière ce nom générique se cache une grande diversité de matériels disponibles.
Face à ce maquis d’aides techniques, il n’est pas toujours facile de s’y retrouver et donc de faire le bon choix.
Il est encore plus difficile de choisir le bon moment pour s’équiper : soit trop tôt, et l’on a du mal à anticiper sur l’évolution de la pathologie visuelle, soit trop tard et l’on est sidérés par la perte visuelle et en difficulté pour se mettre en posture de recherche et d’apprentissage d’un outil.
Comment se repérer dans ce maquis? À quel moment s’équiper?
Ce guide, façonné par notre Conseil Médical et Scientifique, nos experts de la communauté de malvoyants et de non-voyants de Hypra, vise à vous donner des repères et des critères essentiels de choix sur les meilleurs outils et accompagnements en fonction de votre profil.
Ce guide est organisé thématiquement autour des activités que vous souhaiterez continuer à réaliser à domicile, à l’extérieur, des usages les plus élémentaires (lire, écrire) aux plus avancés (se déplacer, s’instruire, faire ses démarches en ligne).
Quelle loupe pour malvoyant m’aidera le mieux à domicile?
Commençons par analyser les activités quotidiennes à domicile et l’impact de la loupe pour malvoyant sur leur faisabilité.
À chaque malvoyant, la loupe qui lui convient.
Commençons par analyser les activités quotidiennes à domicile et l’impact de la loupe pour malvoyant sur leur faisabilité.
Pour lire et écrire sur du papier : la loupe optique est très limitante
À la maison, l’une des tâches les plus fréquentes est la lecture et l’écriture sur des documents papier (magazines, formulaires). Pour de tels usages, très vite, les loupes optiques manuelles sont très limitées. C’est pourtant ce que beaucoup d’opticiens basse-vision vous proposent en premier du fait de leur partenariat avec Eschenbach ou Essilor qui leur mettent gratuitement à disposition.
Il faut suivre ce que l’on écrit tout en tenant le stylo, promener le matériel sur la page, ce qui peut rapidement devenir fatiguant et inefficace selon sa vue et son stade de dégradation. D’autant que la qualité de vision qu’elle apporte ne saurait permettre une lecture dans la durée, du fait des manipulations nécessaires et de l’apport correctif qu’elle représente.
Vous serez vite déçu, donc passez rapidement votre chemin, des solutions beaucoup plus modernes existent !
Pour lire un magazine, un livre ou un papier: pour la loupe électronique, une entrée de gamme suffit.
Les loupes électroniques sont sur le marché depuis une vingtaine d’années. Elles ont l’avantage d’être nomades et de proposer des modèles d’entrée de gamme relativement corrects.
Elles présentent l’avantage de leur taille et de leur poids. Cela ne les empêche pas de disposer de fonctions par lesquelles votre document est affiché avec un traitement de l’image permettant de modifier sa couleur de fond, sa taille, voire la couleur de l’écriture, pour vous offrir le meilleur contraste.
Leur intérêt est de pouvoir se déposer sur le document directement, mais vous pouvez y ajouter un plateau amovible ou fixe pour poser le document et le faire défiler plus facilement, comme vous le feriez avec un télé-agrandisseur.
Les entrées de gamme sont accessibles financièrement mais de durabilité variable, cependant nous ne vous conseillons pas d’investir dans du haut de gamme. Le service qu’elles vous apportent consistera essentiellement dans la lecture seule d’un document papier. Elles ne fonctionnent qu’un temps (en raison de l’évolution probable de votre vue) et pas pour de longs textes.
Nous vous conseillons de privilégier des modèles avec un manche pour éviter la fatigabilité.
Ne fondez pas trop d’espoir sur un usage nomade, dans un magasin par exemple, même si cela peut vous dépanner pour regarder les prix.
Certaines incluent désormais la possibilité de lire vocalement un document, se transformant en machines à lire portables. De telles fonctionnalités peuvent vous permettre de continuer à lire du papier imprimé quelle que soit l’évolution de votre vue, ou peuvent aussi s’utiliser au magasin. Mais cette fonctionnalité fait grimper le prix des loupes à des prix déjà prohibitifs par rapport à ce que des solutions moins chères proposent aujourd’hui.
Pour résumer, les loupes électroniques ont l’avantage d’être nomades, peu encombrantes, maniables à condition de disposer d’un manche, mais limitées dans l’autonomie qu’elles donnent (lecture seule). Nous vous conseillons, si vous voulez investir, de vous en tenir à de l’entrée de gamme.
Pour la mobilité et la lecture en toutes circonstances : les lunettes intelligentes?
Nous pensons que les lunettes Orcam corrigent les lacunes de la loupe électronique en offrant plus de mobilité, moins de fatigabilité au maniement (car elles sont accrochées aux lunettes), et plus de puissance de lecture. La fonctionnalité de pointage a beaucoup progressé et plusieurs membres de la communauté d’Hypra s’en disent satisfaits.
ORCAM est donc une mini machine à lire portable qui permet de lire des courriers, des magazines, le programme télé, à condition bien-sûr à chaque fois qu’il s’agisse de caractères imprimés (les OCR ne reconnaissent pas l’écriture manuscrite, même si des travaux de recherche existent à ce propos).
En revanche, les avantages de mobilité de Orcam apparaissent limitées : la fonctionnalité de reconnaissance faciale reste soumise au fait d’avoir pré-rentré le visage de la personne dans l’appareil, fonctionne difficilement et peut devenir pénible dans un environnement de défilement rapide de visages comme une fête. Par ailleurs, la lecture du nom des rues reste très théorique dans la mesure où il est nécessaire au préalable de savoir d’abord pointer vers le panneau en question et à une distance de moins de 2 mètres, ce qui rend la chose infaisable dans de nombreux cas.
Pour lire les écrans, ORCAM n’est pas le bon outil, même s’il peut parfois dépanner. Privilégiez pour cela un lecteur d’écran intégré que vous retrouverez par exemple dans une Machine à Accès Universel. Enfin, si vous utilisez un vélo d’appartement (ou un autre objet domotique d’intérieur), assurez-vous qu’il soit connecté pour que vous puissiez vocaliser ou adapter l’affichage depuis votre smartphone.
C’est une solution qui fait mal au porte-monnaie, mais qui propose un vrai apport au quotidien. En cas de difficultés de financement, consultez notre guide dédié.
Pour lire et écrire sur du papier : le télé-agrandisseur est une solution onéreuse et encombrante.
Le télé-agrandisseur est une solution que beaucoup d’opticiens en basse-vision proposent et qui reste appréciée des publics âgés de plus de 60 ans parce qu’il donne le sentiment là encore de pouvoir continuer à reposer sur une lecture et écriture papier.
Les fabricants ont beaucoup fait évoluer leur taille et leurs fonctionnalités ces dernières années. Les plus récents incluent même une fonctionnalité de retour vocal, pour vous faire lire oralement un document imprimé difficile à voir, tout en visualisant les images. Par exemple, le ClearView Speech offre un affichage à la fois grossi et en couleurs adaptées à votre vue ainsi qu’un système de reconnaissance de caractères et de retour vocal.
On notera toutefois que ce type de matériel coûte en moyenne plus de 3000€ et peut s’avérer vite encombrant dès lors que sa vue ne permet plus de profiter de ses fonctions d’agrandissement. D’autant qu’il faut être très prudent vis-à-vis de l’idée que plus le zoom est puissant (jusqu’à un facteur de 100) et l’écran immense (jusqu’à 40 pouces), plus la personne pourra l’utiliser longtemps. En effet, non seulement toutes les pathologies ne s’y prêtent pas, mais même celles qui s’y prêtent n’en tirent pas forcément avantage.
D’une part, si votre champ visuel est restreint, un grand écran et de gros caractères rendront la recherche de contenu fastidieuse et fatigante. D’autre part, si le zoom reste une bonne solution pour vous, vous remarquerez très vite que vous ne pouvez pas en abuser. Au-delà d’un facteur de 10, les caractères sont trop gros, la lecture devient extrêmement fastidieuse. Rares sont les bénéficiaires qui utilisent un grossissement dépassant ce facteur quand ils doivent lire un long texte.
Certaines personnes n’en ont donc un usage parfois que pendant quelques mois ou quelques années car leur vue se dégrade assez rapidement, conformément aux courbes connues de dégénérescence visuelle progressive. C’est donc un outil à privilégier pour les cas de dégénérescence lente (comme pour la DMLA sèche ou atrophique).
Quoi que vous dise votre opticien en basse-vision (“il n’y a que deux boutons, c’est un jeu d’enfant”), notez que son usage demande toujours un accompagnement à la prise en main, même minime et que cela est normal (comme le montre l’exemple de Denise dans cet article).
Notre conseil est donc : privilégiez cet équipement en cas de dégénérescence très progressive (DMLA sèche avec injections).
Notre second conseil vise là aussi à vous faire considérer la dématérialisation de votre activité de lecture et d’écriture : un clavier d’ordinateur, une suite logicielle adaptée à la basse-vision, une synthèse vocale et une fonctionnalité “machine à lire” feront beaucoup plus à terme pour votre autonomie que le télé-agrandisseur!
D’autant qu’aujourd’hui livres audios, journaux, magazines, recettes, programmes télé, tout cela peut s’accéder depuis son smartphone ou son ordinateur ! La Machine à Accès Universel comporte par exemple un lecteur de livre audio de type DAISY. Oubliez en revanche les tablettes, même celles de la marque Apple, elles ne sont vraiment pas pensées pour l’accessibilité numérique.